Enfin on reprend. Enfin Ninetchka a cessé de parler comme une mamie, je veux dire qu'enfin ses putain d'amygdales, qu'elle s'est faite enlever en vue d'une carrière dans le cinéma pornographique, ou tout simplement en vue d'un avenir exempté d'angines hivernales incessantes, ont cicatrisé. Pas tout à fait mais elle peut parler comme je peux la comprendre, avec la voix et l'intonation d'une fille de son âge. Au début, quand elle parlait comme Mamie Nova, moi j'arrivais qu'à lui parler de soupe alors qu'elle aurait vendu son appart' pour une glace bien froide; en bref j'y comprenais rien, j'avais oublié que sous cette gorge gonflée se cachait la voix de ma pote la plus proche, celle qui me juge le moins, celle qui prend mon parti avec le recul et la mesure necéssaire pour ne jamais perdre sa crédibilité, celle que j'aime et qui m'aime, et qui n'est chaque fois ni tout à fait la même ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Alors on a repris le cours de nos conversations masturbatoires girly, souvent présidées par des thèmes que j'avance, soit par déprime, soit par envie de débattre un peu; c'est que Ninetchka c'est mon ange gardien tout à fait malicieux, et que si je lui dit que hier j'ai trop déconné et que j'ai niqué avec Untel, et me dira "Meuf t'assures pas" et d'autres blabla pour finalement me demander comment c'était, et si je vais le revoir... Et si je compte le dire à mon mec. Bref, une vraie pote, de celle chez qui je peux débarquer avec un cadavre, non seulement elle me le cache mais elle m'en fait des sushis tellement c'est une psychopathe pire que moi... D'ailleurs maintenant que j'y pense je me demande bien quelle folie est la mienne pour me tourner vers elle au moindre soucis... Le coeur a ses raisons que la raison ignore.
Aujourd'hui donc, nous avons rattrapé le temps perdu à parler gaspacho parce que j'ai eu la mégarde de re-souligner mon côté infidèle. Je pense avoir des problèmes avec la monogamie, et ce, par nature; mais j'y travaille. Bref, j'ai dit, comme ça, bêtement, qu' être en couple c'était bien mais fade malgré tout. Et que décider de vivre pleinement la vie à deux, c'était comme l'hygiène culinaire, manger sain et bio et tout, tandis que les coups d'un soir et les flirts puérils, c'était de la junk food. Du bon Big Mac.
Alors quoi, on aime tous manger sain, mais c'est quand même trop bien un hamburger de temps en temps, des chips, des glaces- que sais-je, toutes ces choses mauvaises pour la santé mais bonnes pour le moral.
Rappelons (je me le rappelle sans doute aussi à moi-même...) qu'en ce moment je vis une grande histoire, que je suis in love, alors trivialement, la question, dans ma vie sentimentalement saine et épanouissante, c'est, (cf Super Size Me), to Big Mac or not to Big Mac?
Ma Ninette elle connaît mon mec, et elle me prévient dès le départ qu'elle est de son côté à lui, car j'avoue que depuis que je passe mes nuits avec lui c'est du répit pour elle quand même, elle a plus de temps pour elle, et elle se fait moins chier avec des conversations de merde... D'ailleurs, elle me l'a vainement demandé, si j'avais pas mieux à penser en ce moment, mais je me suis défendue en lui rappelant que j'adore me prendre la tête sur des trucs trop nuls, "Ah ouais" elle a fait, et donc elle a repris son devoir de grand désamorçage de mes angoisses pseudo-existentielles et surtout vaginales, en fait.
En fair-play, elle m'admet d'abord que c'est cool les hamburgers. Mais que bon, c'est pas tout quoi. Alors elle tranche:
"T'as qu'à juste sentir l'odeur." Maligne la grande... Mais il m'en faut plus, je suis coriace dans le genre...
-Et si j'arrive pas à résister à l'odeur, et que je croque?
"Pense à garder ta ligne ma cocotte."
Touchée-coulée.
Et j'ai eu comme une illumination. j'ai fait ok merci à demain et on a raccroché.
J'ai pris un peu le temps de penser, et de tout sous-peser:
Que d'abord ma ligne j'en ai toujours un peu eu rien foutre, parce que je suis une vraie gourmande.
Que j'aime bien les hamburgers; ok, je suis trop snob pour le Mc Do, mais assez euro-patriotique pour un Quick.
Et que la vie elle est pas si longue que ça, quoi.
Puis j'ai fait un petit retour à la case départ. J'ai revu ma liste de courses, mon panier affectif, bio, pas bio, mayo, hot dog... et j'ai regardé du côté de l'homme qui est à mes côtés (l'inconscient!), pour voir quel goût il avait, déjà.
Macrobiotique? Non, mon mec n'est pas de ce bord-là.
Du Quick? Il a plus la classe que ça.
Je crois qu'il est un peu des deux. C'est mon rôti rose, mon magret de canard, et mes petites frites grasses à moi... Avec lui, j'en ai toujours à me mettre sous la dent, et j'ai de la chance, il ne me sert jamais la même chose, ni au lit, ni au sourire. J'ai pas de bonjour-bonsoir, je sais pas vraiment à quelle enseigne je suis; ni ce qu'il est, en vrai. Ce petit caméléon, plein de recettes, m'a bien saisie... Quand je crois que je vais avoir de la bonne viande bien rouge bien saignante, il se montre léger et intriguant comme une belle Roquette; quand j'en veux pour ma crème fraîche, il se dévoile pimenté et fort comme de la moutarde...
Avec ce menu infernal, pour l'instant, he got me.
(C'est vraiment vrai que je pense des trucs à deux balles quand j'ai rien à faire de mon dimanche... Il faut que je rappelle la Ninetchka, pour lui dire.)
(photo: Helmi Charni... Merci.)
5 commentaires:
J'ai une petite recette de tartare de fruits et légumes aux trois fromages qu'il faut qque je te fasse test!
Hahahahah!
J'adore ce texte! Normal, me dira tu, puisqu'il parle de moi!
Non, je l'aime bien, parce qu'il me rappele une chose... on kiff l'odeur du big mac parce qu'on peux se permettre de ne pas y toucher, et ça c'est pas donné à tout le monde!
C'était la conclusion catho!
Je sais pas pourquoi je suis anonyme...
C'est bon j'ai compris!
elles sont belle tes histoires
c'est bien ma nina!
merci
Hola Betty, evidentemente no entiendo demasiado de lo que acá se dice... por ahora, porque tengo pensado en el verano (tu invierno) empezar a estudiar francés, y así poder abordar los Autres écrits, que me imagino habrás hojeado... en fin, no sólo Lacan, sino a esta autora que al parecer sabe reducir Hamlet a una hamburguesa... excelente idea, aunque por supuesto no puedo saber en qué resultó.
En fin, quería pasarme por acá y saludarte. Así que, bonjour... o au revoir, no sé, on verra bien.
Jaja, besos!
Darío
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