jeudi 13 mai 2010

WE ARE BITCHES



Hier, avec des copines, dont j'ai absolument pas le droit de citer les noms, disons Lola et Fifi, comme ça c'est réglé, on a passé notre soirée à parler de garçons. C'était même un constat affligeant sur le coup, le numéro des filles libres qui parlent toute la soirée de la gente masculine. Le pire, c'est qu'il y en avait un présent avec nous, Michel, et que Michel il hallucinait complet, le pauvre. Surtout que nos conversations chipotaient principalement autour d'une et d'une seule pratique du flirt : les sms, mails, et autres liens envoyés via Facebook ou via le net.

L'une flippait totalement parce que le mec qu'elle aimait bien lui avait envoyé le lien de genre son clip préféré, et il s'avérait que c'était un peu une pop naze et nasillarde, du style le deuxième clip de Craig David. En blanc. (J'ai pas le droit de dire l'artiste, sinon elle me tue de tout balancer.) Disons quand même qu'elle en était toute retournée, le bout de femme, qu'un mec avec qui c'était plutôt bien parti lui envoie un clip de merde en disant qu'il adore, en plus en le disant avec un texte en cinq lignes critiques genre il s'est cru auteur dans Les Cahiers du Cinéma.
Elle essayait de pas paniquer.
Elle demandait jusqu'à quel point elle devait totalement flipper, se dire qu'il est un maillon faible, et lui dire, ou pas, au revoir.
Et à cela s'ajoutait des sms louches et pas hyper détonateurs de flots de cyprine, si vous voyez ce que je veux dire.

Et moi, pareil.
Dans une situation un peu complexe où je me retrouve à flirter avec une casserole que j'arrive pas à savoir si elle est vieille ou pas, je reçois un mail déprimant. Du genre trop cheum. Du genre c'est pas possible, le mec me parle de Facebook.

Même si vous ignorez le message du mail, vous voyez bien déjà qu'il y a effraction à l'article 2 de la classe et des relations homme-femme : je mets pas l'album de Rihanna quand tu viens dîner à la maison, tu n'écris pas sur Facebook quand tu m'envoies un petit mail. C'est blasphème, c'est comme le "kikoo", ça tue un homme, même un vrai.
Bref.
J'en étais verte, j'avais perdu tous repères, je savais plus quoi faire, quoi dire, ni que répondre. Rien à répondre d'ailleurs. Utilisons le silence pour montrer la déception mesdames, ça pousse les hommes, pour une fois, à penser par eux-mêmes.

Puis, le petit gars qui avait écouté 3h de conversations sur nos mecs et autres contrariétés, qui s'était fait discret, le pauvre, me donne son avis alors que je savais toujours pas s'il me fallait dégueuler sur ma boite mail, me pendre dans le salon ou arrêter d'y penser et le nier, comme un mauvais souvenir de Shoah. Ou encore lui répondre juste "t'as la palme du mail le plus pourri de tous les temps", mais ça, on me l'a franchement empêché. Ne restait plus que de me pendre.

Sauf Michel le gentil garçon posé là tentant de passer une bonne soirée avec trois furies folles furieuses, qui timidement s'aventure à donner son humble avis testiculaire :

"Peut-être qu'il voulait juste dire que ça lui faisait plaisir."

Ah ouais.

J'y avait pas pensé, que dire "je like avec mon pouce" impliquait, même en dehors du cadre facebookien, une notion de plaisir et de joie.

Donc ça lui faisait plaisir. Et Michel qui rajoute :

"Mais en gros, vous jugez chaque mots qu'on vous envoie ? C'est fou. On peut pas tout prendre à la lettre."

Certes.

Sauf que j'aimerais bien savoir comment tu fais pas autrement. Quoi, franchement, vous allez me dire qu'il n'y a pas de différence entre :

"On se voit vers 20h t'es ok ? Ca te dit de bouffer mexicain ? Bises."

et

"Madame, je vous veux vers 20h libre et toute à moi. Pour une soirée tacos."

ou encore

"Chérie, ce soir je te nourris, on fera le tour du monde tu verras."

J'avoue que mes exemples sont limites. Prenons le sms le plus bateau :

Énoncé :
"Moi aussi j'ai passé une bonne soirée. A bientôt. Bises"

Analyse :
-Le "moi aussi" suggère que c'est pas lui qui a remercié pour la soirée. Moyen. Puis combien de temps après notre sms de remerciement a-t-il répondu ? A clarifier. Si plus de 10 minutes, moyen.
-Le "à bientôt", ça veut dire je veux pas le dire quand mais je sens que je peux me passer de toi 24h/je laisse tout incertain/ qui vivra verra/ ne nous prenons pas la tête/je suis un homme libre/ tu m'auras pas comme ça pétasse/ demain je vois mes potes/ si je veux te voir j'ai laissé la porte suffisamment ouverte pour t'appeler à 3h du mat' samedi.
-Enfin, le "bises" nous achève. Bises, c'est moche, impersonnel, même pas sexy comme un "je t'embrasse" qui implique le sujet actant, et celui qui reçoit. Bises on déteste. Même si y'a genre un pluriel qui suppose une gourmandise ou générosité, dont on se contrefout à ce stade du sms.

Bref.


Alors d'accord. Ne surtout pas prendre à la lettre ; ne surtout pas flipper sur un mail hyper moche, loin des élans des débuts ou de la poésie du XIXè ; ne surtout pas m'arrêter à ...

Je veux bien.

Mais enfin, si le prochain mail est nul, limite glauque, je fais quoi ? Je continue à ne pas regarder au pied de la lettre ? S'il se rattrape en m'envoyant un clip de Shania Twain pour me montrer qu'il a bien compris que j'étais une femme dominante et pointilleuse au caractère fort, je me pends pas ?


Sérieux.



dimanche 9 mai 2010

De l'oestrogène et autres nouvelles

J'ai maigri.
Tout le monde m'en parle. C'est ça la France : "hey, salut, ça va, oh, comme t'as maigri !". Je me demande de quoi parleraient les Parisiens s'ils ne parlaient pas de leur poids. Dans ma famille, par exemple, ça ferait qu'on aurait bien trop peu de choses à se dire, parfois.

Tu manges ? T'as faim ? On dirait qu'à mon contact chaque individu se transforme indubitablement en mère juive. Même mes potes d'origine belge s'y mettent. L'enfer. On veut me faire avaler tout et n'importe quoi.

Donc, j'ai maigri, et je vous en parle comme une bonne Parisienne qui se respecte.

En parlant de respect, ça faisait un bail que j'avais pas pris contact avec moi-même, et je vous parle pas forcément de masturbation là, seulement le fait de se poster devant la glace et de se mater vraiment, voir à quoi je ressemble, moi qui ferais mieux d'aller m'empiffrer quelques kebabs plutôt que de me tuer au travail pseudo intellectuel.

J'ai bien vu que j'avais maigri, mais finalement pas tant que ça. La seule tragédie dans cette histoire, c'est la disparition de mes seins.
Mes seins sont tous petits, on dirait qu'ils sont partis en vacances. Mes seins sont tristes, voilà ce que je me suis dit.

Et après ce pathétique constat, j'ai enfilé une robe moulante et je suis sortie. Autant profiter de mon nouveau petit body, quand même.

Sur la route de l'alcool et des bars, j'ai appris une chose qui allait changer ma vie à jamais, mais je l'ignorais sur le moment. Désormais, ma vie est en révolution depuis que je sais ce que j'ai appris hier soir vers 2h du matin.

Un pote, K., m'a dit, en regardant d'un air déçu ma poitrine qui d'antan était fameuse :
Ouais, si t'as plus de mec depuis deux semaines, t'as moins de nichon, c'est normal. Franchement, je voyais pas le rapport, mais je me souvenais bien comme ils étaient beaux et frais mes seins, avec la peau tirée à bloc et tout, on aurait dit qu'il y avait du lait, alors que là on dirait que j'ai tout donné à des triplés affamés.

K. m'explique encore :
Bah, c'est les hormones, les œstrogènes quoi. Plus tu jouis, plus tu en sécrètes, plus tes seins gonflent.

Sans doute le saviez vous déjà. Moi j'avais la bouche ouverte qui descendait sur le comptoir, c'est pourquoi mon copain K. après il s'est lâché en disant de plus en plus n'importe quoi, du genre Je m'y connais à mort en femmes / je suis une tapette virile / et / les juives ont des poils pubiens extra.

Sachez que le coup des poils pubiens, je lui ai pas laissé passer, alors on s'est accordé, selon lui, que les juives avaient de belles chattes, ce qui peut être une réflexion un peu limite, certes, mais disons qu'elle me convient étant donné que je fais moi-même partie de cet extraordinaire peuple élu. Et que ça me rassurait de me dire que mes seins s'étaient peut-être fait la malle, en attendant j'avais un vagin* trop bien.

Selon un mec qui ne le connait pas.

On se rassure comme on peut.

Si dans ma culotte je n'ai donc pas de souci à me faire, j'ai le constat déplorable qu'il me faut au moins jouir une fois par jour pour avoir une poitrine décente, et qu'autrement je ressemblerais à ces célibataires de trente ans à la piscine qui ont des seins tristounes et qui pensent que leur liberté, qui consiste à s'envoyer en l'air avec l'inconnu romantique du samedi soir, leur convient largement.

Niet. Je ne me ferais pas avoir. Je veux ma dose d'œstrogène, bordel.



*(Quelle alternative à "chatte" ? "Vagin" ?)

dimanche 2 mai 2010

L'art de la procrastination







Je me la joue Esmeralda depuis une semaine. Ou presque. (J'adore le personnage d'Esmeralda.) Je ne rentre plus chez moi.
J'ai pas du tout envie, parce que je dois mettre de l'ordre et faire le ménage et bosser.


Je suis une très mauvaise femme d'intérieur.

Du coup, je dors partout, en attendant, je me reconnecte avec des personnalités inattendues, je voyage loin de chez moi. Je prends des douches dans des chambres de bonnes près de la place des Vosges et des bains dans des Jacuzzis dans un bar désaffecté. Ou je dors dans des grands salons aussi.



Une brosse à dent dans mon sac, je ne mets même plus de crème, je garde que l'essentiel, la peau, et j'ai tout bonnement acheté des culottes pour régler cette habitude de nomade que j'ai chopé comme un coup de soleil. J'ai aussi acheté des sabots à talons déments, pour pouvoir sortir un peu tout en portant depuis 5 jours le même jean et que des vêtements d'homme.




Il y a quelque chose de désespéré et de complètement grisant à vivre ainsi. Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et demain c'est avec une nouvelle paire de draps, sans traces d'hommes, que avec des odeurs de jeunes filles et de vanille et de jasmin, ou pas, que je dormirai comme un bébé, peut-être avec une copine, et je regarderai la Chartreuse de Parme.


Vaste programme.



J'ai rencard avec moi-même.




Je vais mijoter des trucs. Des plans. Machiavéliques. Avec des légumes et des surprises. Je vais m'abonner à l'air de printemps que j'évite comme un vieil arbre d'automne. Fini les jeans larges habillée en mec. Robe, jupe, trucs de filles, crème, vie, danse etc., mille saveurs enfin qui se pointent et que cette fois je laisserais entrer dans mon appartement.