mardi 22 décembre 2009

Je suis féminisme


Cela fait un certain temps que j'ai envie de parler de féminisme. De ce mot décharné, devenu dans la bouche de certains synonyme d'insulte, de frustration, ou de médiocrité de son sexe. Ce mot honteux qu'on porte comme un vieux "isme" de l'après-guerre, ce mot des gouinasses, des moches, et des putains. Il est vrai que depuis que je l'étudie, je trouve peu de théoriciennes et théoriciens qui échappent à la caricature, et dont la totalité des arguments me conviennent, ou me touchent. Et pourtant, j'y reste attachée, à ce mot-là. Cette belle idée.

C'est quoi, aujourd'hui, être féministe ?

C'est quoi, pour moi ?

Utiliser le mot de féminisme n'est pas anodin en soi : on aurait pu trouver autre chose, depuis le temps, mais non, on s'attache sentimentalement et bêtement à ce mot qui a permis à un moment donné, y'a un peu plus de 50 ans, à une femme d'aller seule à la banque, ouvrir son compte, voter, porter un pantalon, demander le divorce, jouir aussi avec son clitoris, et le tout peut-être dans la même journée. Si c'est pas du progrès.

Malheureusement pour les idéalistes, je fais partie de celles qui pensent que tous les murs ne sont pas abattus en matière de libération de mon sexe. Et heureusement aussi, car en cela je me considère comme parfaitement lucide. Et nécessaire.




Quand je pense à mon mec 60% du temps, je me demande où est mon féminisme. Quand je regarde Gossip Girl, pareil. Quand je devine que c'est moi qui devra travailler moins si j'ai un môme, aussi. Quand je sais mes sacrifices du passé, du présent, et de l'avenir, je me demande dans quel tiroir je me le mets, mon féminisme.

Le féminisme est une notion immense, toujours en progression, toujours à creuser, à actualiser. Très difficile à saisir par un bout. Là, je peine.

Si l'histoire culturelle et sociale pointe clairement les inégalités, les atrocités, les disparités entre les hommes et les femmes (que je ne vais pas développer là, c'est pas mon propos), il y a une culture répressive de la femme ancrée plus profondément encore, et qui me touche plus particulièrement : celle qui nie les femmes dans leur nature profonde. Pour ça, peu de lois applicables encore. Pas de sanctions, ni d'amendes.

Quelle est la nature profonde d'une femme ? Je l'ignore franchement, et j'espère que les empêchements, les négations, les bâtons dans les roues d'une société du masculin ne déterminera pas en négatif ce que nous sommes chacunes individuellement.




Si je n'avais pas un grain, je n'aurais sans doute pas été féministe. Si je n'étais pas folle, comme les hommes l'entendent, comme ceux qui internent les femmes l'entendent, comme ceux qui insultent les femmes l'entendent, comme ceux qui définissent les dictionnaires le pensent, je ne serais peut-être pas féministe.

Je suis née avec une voix grave, cassée. Pour me faire entendre, casser.
J'ai été élevée comme une sauvage qui s'est toujours sentie suffisamment libre pour dire toujours haut et fort ce qu'elle pense, et je n'ai jamais compris la politesse, sinon le respect. La politesse de respecter les vieilles connes, de sourires aux vieux cons, de fermer mes jambes, serrer les genoux, fermer ma bouche et serrer les dents, connais pas.

Être féministe, vouloir donner sens à une notion obsolète pour la majorité ignorante, c'est continuellement combattre les préjugés qu'on accorde au caractère de la femme, à ce putain d'éternel féminin qui nous étouffe.




Non, je ne suis pas douce. Ni patiente. Je ne sais pas coudre. Ni faire correctement le ménage. Je ne veux pas me lever la nuit changer les couches d'un enfant. Ca ne me semble pas naturel, ou propre à ma naissance.



Et surtout, j'assume continuellement de porter les insultes qu'on a gentiment créer pour que les femmes évitent donc d'être ce que je suis : une harpie, une mégère, une salope, une chieuse, une castratrice.

Tout ça, c'est moi. Ce n'est pas le mot féminisme qui colle pas, mais la croyance persistante et la crainte d'incarner ces terribles mots-là. La mégère, ce n'est qu'une femme qui s'occupe des choses qui l'entourent; la harpie, une femme qui se défend. Une chieuse, c'est une femme qui existe; une salope, une qui se paie du bon temps.

Et une castratrice, au jour d'aujourd'hui, c'est une femme libre. Point.





1 commentaire:

Smiling Mad Hatter a dit…

Une petite piste pour quelques réponses sur le féminisme : "La Femme indépendante" de Simone de Beauvoir.

C'est pas trop long, intéressant et très construit. ^^